J'imagine

J'imagine

Texte :

Écrit le 10 juin 2023 (30 ans)

"Septembre vient chasser l’été chaotique que j’ai passé ; je compte sur la rentrée pour me changer les idées. Le problème c’est que les cours ne m’amusent plus autant qu’avant. Plus rien n’est vraiment distrayant.

Je monte dans les métros, j’emprunte de nouveaux bus, mais je n’ai pas la moindre idée d’où je vais et j’ai l’impression de ne jamais atteindre la bonne destination.

Je peux dire que j’ai des amis maintenant, pourtant, que ce soit dans la rue ou les amphithéâtres, je ne me suis pas sentie si seule depuis longtemps.

Ma vie a pris un drôle de tournant, n’importe qui savourerait ce virage mais j’imagine que c’est pour ça que je ne suis pas n’importe qui.

Tout me semble bien morose. Je ne pensais pas qu’il me serait aussi difficile de passer à autre chose mais j’imagine qu’il ne pouvait pas en être autrement avec lui.

Voir son parfum sur d’autres hommes me donne envie de vomir. Je veux le haïr mais je refuse de le ranger dans la même case que tous les connards que j’ai croisés. Le vendredi ressemblait à un instant de liberté ; maintenant que mes soirées ne sont plus occupées, je me sens comme emprisonnée.

Mais tout cela je n’en parle pas. Je veux attirer les gens, pas les repousser c’est pourquoi je ne pleure plus en face de quoi que ce soit. Je garde ma tristesse bien enfouie au fond de moi.

Je relègue au placard les cahiers dont je ne me servirai plus jamais. Je maudis l’espace longtemps désiré dont je jouis désormais.

C’est à lui que j’ai envie de parler ! Je n’ai pas besoin d’un nouvel étranger qui ne saura même pas lui ressembler.

Être débarrassée d’une matière a amputé ma vie d’une partie toute entière.

Je repense à son rire, son sourire, ces petites manies. Au hauts, au bas, à toutes les fois où il a cru en moi, et aux innombrables conversations que nous avions. Désormais il n’y a plus que lorsque je me mets à rêver que je peux discuter.

J’ai entendu une portière se refermer. Est-ce lui qui l’a claquée ? Est-ce le jour ? Est-ce l’heure ? Est-il là pour m’emmener loin d’ici ou suis-je en train de sombrer dans la folie ?"


Explication :

J'ai vécu cette situation en 2013 mais parfois, j'ai besoin de temps pour mettre des mots sur ce que j'ai ressenti. Quand les émotions sont trop fortes, on a du mal à penser clairement et à mettre ses idées à plat.

Le départ de quelqu'un peut nous amener à perdre tous nos repères du jour au lendemain. Cela nous déstabilise totalement, surtout quand cette personne n'avait pas autant d'importance pour les membres de notre entourage et que certains n'en connaissaient même pas l'existence.

On n'a personne vers qui se tourner pour parler et on se persuade que l'on n'a pas le droit d'être triste alors, on essaye de se concentrer sur le quotidien et de se changer les idées mais rien ne parvient à nous faire oublier le sentiment de solitude que l'on ressent et on pense encore et toujours à la même personne, à ce que l'on avait et ce que l'on a perdu.

C'est simple, il nous est impossible de nous concentrer sur autre chose.

On repense à toutes les discussions que l'on a pu avoir. On se raccroche au moindre petit souvenir : des cahiers, une boîte que l'on a conservée au lieu de la mettre à la poubelle, un parfum identique que l'on croise dans la rue, une silhouette vaguement ressemblante.

On refuse de passer à autre chose car on ne peut pas passer à autre chose. On n'a qu'une seule idée en tête : comment retrouver ce qui est perdu ?

Cela a représenté la première étape de ce qui m'a mené à faire une dépression. 

Aujourd'hui, je vais mieux. Je n'ai pas retrouvé ce que j'ai perdu et je commence à me faire à l'idée que cela est impossible, que je ne pourrai jamais avoir la même relation que j'avais avec cette personne. Ce n'est pas ce qu'il y a de plus facile à accepter.

Mais mes souvenirs, eux, personne ne peut me les retirer. Ils m'appartiennent et m'appartiendront pour toujours.


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